30 avril 2010


MAURICE 



Maurice n'avait pas d'yeux mais il ne semblait pas s'en soucier.
Il avait à la place les narines élastiques.
Marche dans le printemps
en piétinant un peu d'hiver
en piétinant un peu d'été.
Maurice n'avait pas non plus de mains
mais pour autant les caresses du vent le comblaient.
Être passif dans la sensualité lui semblait le plus doux des délices.
Marmonne des pensées charcutières en mâchonnant ton macaron,
rigole à la vue des cimetières,
sourcille du menton.
Aie l'allure altière.
Maurice n'était ni chétif ni cynique,
pourtant, il n'était pas non plus courageux.
C'est assis dans un arbre qu'il se sentait le mieux.

Un soir, 
Maurice dîna d'une colombe et de pain frais.
Il constata que les jours passés n'avaient pas gâté la salade
qu'il glissa entre les deux en la poussant du pied.


BLAISE

Arnulf Rainer


Blaise était emmerdé par son baxter
et puis le cathéter lui engourdissait le bras.
Il avait un peu froid et aurait bien enfilé un pull pour 
aller marcher un peu dans les couloirs.
Il dut pourtant se résoudre à remonter la couverture jusque sa glotte,
grelotter moins,
et trouver à se promener derrière ses yeux fermés.
L'ennui est cette chose qui s'étire
et dont certains ont besoin comme d'une mine à creuser.
Au fond de lui, ou bien juste à son bord,
ils trouvent parfois l'objet d'une pensée neuve,
la matière d'un inconnu riche,
ou même la surprise d'une évasion belle.
Blaise se sentait entravé par son baxter,
comme poursuivi par un fantôme de métal,
alourdi dans sa démarche.
C'était comme une mauvaise conscience
le freinant dans son besoin d'aller de l'avant.
Pourtant ce n'était rien plus qu'un bâton froid monté sur roulettes
qu'il aurait pu utiliser pour s'initier au pool dancing
-ce qui à terme aurait pu arrondir ses fins de mois,
épargner des sueurs froides à son porte monnaie
au moment de payer les soins.
Dans sa course le baxter grinçait
(il aurait fallu passer un peu d'huile sur les roues)
et le fil du cathéter s'enroulait constamment autour.
C'est qu'une chose pour avancer
doit immanquablement tourner sur elle-même.
peut importe sa forme, elle est ronde.
et même si le sol la fixe,
la pesanteur ne fait rien pour stopper ce mouvement.
Mettre un pied devant l'autre,
et le grincement chante un rythme régulier.
Quand il se ballade Blaise aime s'amuser à marquer des ruptures sensibles,
tendre l'oreille et redoubler d'attention 
car tout son est musique, même funèbre.
Blaise aurait bien voulu quitter son lit et marcher en cadence
jusqu'à la cafétéria bien au chaud dans son pull.
Et s'enfiler une boisson chaude ne lui aurait pas déplu.




ET LES AUTRES....



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