mon taux de colère stérile

Je suis un coton tige et j'ai peur c'est officiel.

J'ai peur qu'en ne faisant pas signe, 

nul ne revienne jamais vers moi.

J'ai peur de n'avoir plus guère d'utilité depuis que le bon docteur a dit que mon usage était nocif car il pousse le cérumen dans la profondeur du conduit plutôt que de l'en extraire. 

J'ai peur de devoir rester cloîtré dans l'oubli du placard de la salle de bain, ou d'être mis à la poubelle même si je ne suis ni biodégradable ni recyclable. 

J'aurais pu toutefois, si la parole m'avait été donnée, démontrer mon utilité dans le récurage des joints du carrelage de la cuisine ou des faïences de la salle de bain, ainsi ne pas tomber dans l'oreille d'un sourd. Bénéfice secondaire.

Aussi j'accepte, même si c'est difficile, que mon rôle change de nature, et ce, même s'il va me manquer d'aller m’enfouir dans la profondeur des conduits auditifs, d'en fourrager l'embouchure, débusquer le nectar. Même s’il va me manquer de chatouiller les dénivelés qui parcourent les pavillons, d'en emprunter les sillons. Réajustement.

...D’autant que je suis joli après tout. Avec ma petite gueule enfarinée je pourrais imiter le bonhomme de neige anorexique, la portion congrue de barbapapa qui vient sauver le bonhomme de neige de la mort promise, ou encore un minipousse somalien et albinos qui dit "je me retire définitivement de la vie politique" après inhalation d'hélium. amuser un peu la galerie. 

Pourtant le peu de temps qui manque, le peu de temps qui reste : avec ou sans moi ?

 le temps en temps avant le temps qui court et fait son œuvre fait que j'ai peur qu'on m'oublie. j'avoue je me sens oublié par endroits. Le coin du placard ou j’attends voit la poussière s’amonceller. je me sens un peu chose. comme un enfant qui ne sait pas quoi faire de ses mains.